dimanche 7 novembre 2010

Le Meilleur Tchekhov


FRICASSÉE D’AUTOMNE

En ce pluvieux temps d’automne, je vous propose une fricassée de coups de cœur pour vous animer, pour vous divertir, pour vous allumer. C’est selon. D’abord mon grand coup de cœur du mois, celui que j’ai vécu chez Duceppe : la remarquable mise en scène de La Cerisaie, signée par Yves Desgagnés. J’ai vu la plupart des œuvres de Tchekhov et même quelques comédies qu’il a commises au Québec et en Europe. Ce qui me permet d’affirmer que Desgagnés a accompli l’exploit d’alléger, de dépoussiérer et d’actualiser sans dénaturer cette dernière pièce écrite par Tchekhov.

J’ai lu quelque part une très mauvaise critique du travail de Desgagnés dans je ne me souviens plus du journal et j’enrage de constater la mauvaise foi sûrement l’incompétence de cet auteur qui ne sait sûrement pas reconnaître les difficultés que propose Tchekhov. À vrai dire, on réussit rarement à bien jouer Tchekhov. Il y a de quoi se casser les dents. Je me souviens d’un monumental four au Rideau Vert il y a une dizaine d’année. D’un ennui mortel. Il n’y a que le théâtre de l’Opsis et évidemment Serge Denoncourt ainsi que Yves Desgagnés qui ont réussi à bien monter Tchekhov durant les dernières années.

La comédienne Andrée Lachapelle m’avait dit avant d’aborder le célèbre dramaturge russe : « Jouer du Tchekhov, c’est comme marcher sur des œufs, constamment». Et cette grade comédienne a beaucoup joué du Tchekhov. Beaucoup. Il y a dans les textes tant d’intentions, de passions, d’analyses, d’explosions et de détresse sans qu’il n’y paraisse. Imaginez le travail de l’acteur qui doit livrer le sous-texte. Et je pense évidemment à Gérard Poirier qui a magistralement rendu le personnage du vieux Firs. Jean Gascon a déjà interprété ce rôle. J’ai déjà vu une production belge de La Cerisaie où ce personnage était interprété par une marionnette géante que le marionnettiste laisse tomber à la fin du spectacle. Poirier a lui aussi, bien compris la décadence du personnage en traînant les pieds et tout son corps accablé.
J’ai beaucoup aimé aussi Pierre Colin en Pichtchik, ce russe fêtard, buveur, danseur ainsi que Normand D’Amour, férocement entrepreneur, magouilleur quasiment capitaliste dans cette Russie au bord de la révolution de 1907.

Le tableau de ce bouillonnement des idées est saisissant dans ce portrait de Tchekhov fort bien rendu par Desgagnés qui a réussi à se dégager de l’ennui dans une pièce qui traite de … l’ennui de la bourgeoisie et des profiteurs d’une autre époque.

Humour
Dans cette fricassée, il y en a aussi pour l’humour. Après Daniel Lemire, c’est du grand de stature, Martin Petit, dont il sera question. Je suis allé le voir à reculons et je ne l’ai pas regretté. Parce que la proposition de Petit est claire et sans ambiguïté. Il s’adresse à un jeune auditoire, parle de la vie, du cul, du couple, de sa taille, des excréments, de l’actualité et tout, tout. Tout. C’est assez loin du théâtre, j’en conviens. À vrai dire c’est du vrai stand-up comic et ça cartonne comme disent les Français. Il est tout ce que n’est pas Daniel Lemire, c’est à dire, vif, rapide, punché avec des blagues à l’emporte pièce. Le contenant est impressionnant. Le contenu, c’est beaucoup moins fort. Disons que ce n’est pas Guy Nantel…

Sylvie Drapeau
Très mauvaise nouvelle, le producteur et comédien Jean-Bernard Hébert m’apprenait que la comédienne Sylvie Drapeau n’interprétera pas, en fait elle n’interprétera plus le personnage de Édith Piaf dans la fameuse production Piaf présentée l’été dernier au Théâtre de Rougemont et actuellement en tournée au Québec. La consolation, c’est que Dominique Leduc, qui jouait le rôle de Momone, remplacera avec beaucoup de talent Sylvie qui est au grand repos pendant une période de six mois. Je crois que la grande comédienne est allée au bout de ses forces…

Gilles Dessureault
L’homme qui est derrière le succès de Belles-Sœurs, la comédie musicale qui a triomphé à Joliette l’été dernier, est de retour, à la direction d’un théâtre mais pas à Joliette. Celui que plusieurs considèrent comme l’un des meilleurs diffuseurs au Québec (et je suis l’un de ceux-là), Gilles Dessureault a séché pendant une bonne année avant qu’on ne lui fasse signe à Victoriaville. Regardez bien comment il va transformer le théâtre à Victo!

jeudi 7 octobre 2010

LEMIRE AU RALENTI


SÛREMENT PAS ÉGAL À LUI-MÊME

On s’étonnera peut-être de retrouver la critique du spectacle d’un humoriste à l’intérieur de ce blogue d’un Théâtre à cœur. Il n’y a pas méprise, je considère le spectacle de Daniel Lemire comme une prestation théâtrale, tenant compte qu’il s’agit d’une performance de comédien interprétant des personnages dans un décor, entouré d’autres comédiens. Pas étonnant de voir autant d’humoristes jouer dans des séries dramatiques parce qu’un spectacle d’humour est à mon avis une pièce de théâtre que l’artiste doit préparer comme s’il s’agissait d’une soirée de théâtre avec un texte solide, serré qu’il doit défendre pendant deux ou trois heures. J’ai un tas d’exemples en tête mais j’en retiens un qui illustre exactement ma pensée. Celui du magnifique Michel Boujenah, présenté régulièrement au Festival Juste pour rire à titre d’humoriste. Écoutez-le et dites-moi si c’est vraiment drôle à se rouler par terre. Mais non! on sourit, on se laisse entraîner par une histoire et on se berce dans la poésie de ses personnages. Vous voyez! La ligne est mince et en fait, elle n’existe pas. Stéphane Rousseau, Jean-Michel Anctil, Lise Dion, Yvon Deschamps et Clémence, Martin Matte : c’est du théâtre.

Daniel Lemire c’est aussi du théâtre. Je devrais dire que c’est surtout du théâtre. Il a commencé sa carrière avec des personnages. C’était au Club Soda et il jouait le rôle de Yvon Travaillé, un fonctionnaire borné et simplet vêtu d’un horrible complet à carreaux. Il a créé par la suite, une foule d’autres personnages qui ont toujours obtenu du succès. Je pense à son impayable crooner, à son guitariste drogué Roney, oncle Georges évidemment, ou cet ex-fumeur enragé qui n’avait pas vraiment d’identité et d’autres personnages occasionnels.

Daniel Lemire semble s’être lassé de tout ce petit monde qu’il avait créé sur scène et a fait bien d’autres choses que de faire rire pendant un certain temps, en écrivant beaucoup et en jouant même dans une série dramatique à la télé. Après presque dix ans d’absence, il est revenu sur les planches avec un nouveau spectacle qu’il présentera dans les grandes villes du Québec et à Montréal au Monument National. J’ai vu la première de ce spectacle dans ce Monumental National si chaleureux, si hospitalier. Il fallait qu’il le soit en ce grand soir de première avec autant de personnalités qui ont traversé un véritable déluge alors qu’une tempête sévissait sur Montréal. C’est donc trempé jusqu’aux os que j’ai vu Lemire présenter le pire spectacle de sa carrière. Et je les ai tous vus et tous aimés. Je n’arrivais pas à comprendre ce qui se passait sur scène. C’était lent, prévisible, lourd et Lemire me semblait tout à fait absent. Il a même laissé les deux comédiens qui l’entouraient, prendre à plusieurs reprises, plus de place que lui. Surtout dans le sketch de l’oncle Georges. Un sketch complètement raté à mon avis et qui pourtant ouvrait la porte à de nombreuses possibilités comiques. Imaginez! L’oncle Georges engagé comme clown chez les vieux. Il aurait pu chercher les vieux dans la salles, leur demander leur chèque de pension de vieillesse, les menacer physiquement (en référence aux mauvais traitements dans certaines maisons d’accueil). Mais non, ce sont les deux faux vieux que les comédiens interprètent qui se démènent pendant le numéro. Roney est toujours aussi vaporeux si je puis dire mais pas trop renouvelé. Un bon numéro sur la météo, peut-être le seul de la soirée à part la revue de l’actualité où le comédien se réchauffe et laisse entrevoir une belle soirée. Ce qui ne fut pas le cas et je le dis avec beaucoup de tristesse. Parce que j’aime beaucoup Daniel Lemire. Et remarquez bien une chose : on exige toujours plus des artistes qu’on aime. Daniel Lemire n’a jamais eu besoin de parler de cul, de sacrer, d’attaquer qui que ce soit pour amuser les foules. Il a gagné l’estime des gens et leur admiration par son talent. Il est de la lignée de Yvon Deschamps.Et à bien y penser, l’humour est un art si complexe, si fragile qu’il suffit de bien peu de choses pour tout changer. Dans ce cas-ci, un peu plus de vitesse, un peu moins de trac, un peu plus de présence et éliminer certains numéros comme celui qui se déroule dans le grand nord et qui n’a provoqué aucun rire dans la salle. C’est pour ça que je ne vous déconseille pas d’ignorer ce spectacle. Les comédies ne sont pas toujours réussies les soirs de première. Parfois, il faut y mettre un peu plus de temps. Je parierais que cette …œuvre théâtrale aura changé dans quelques semaines.

lundi 20 septembre 2010

De l'audace chez Duceppe



A PRÉSENT POUR COMMENCER L’ANNÉE

Le Théâtre à cœur c’est tout simplement le théâtre que j’aime, qui me tient à cœur et que je visite avec émotion. Le théâtre est à mon avis, une affaire de cœur. Je ne crois pas au théâtre cérébral, aux thèses défendues sur scènes, aux propos hermétiques, à la contemplation de soi et des autres, à l’auto-édification et aux manifestations du savoir. Je crois plutôt à l’universalité d’un théâtre de cœur qui vient nous chercher dans tout ce que nous sommes. C’est pour ça que c’est à grands coups de cœur que j’irai vivre et partager avec vous les grands moments du théâtre et c’est à contre-cœur que je vous inciterai à passer votre chemin dans certains cas et à aller voir ailleurs.

C’est avec un premier coup de cœur que je débute cette nouvelle saison avec À présent de Catherine-Anne Toupin, à l’affiche chez Duceppe jusqu’au 16 octobre. Je sais bien que cette pièce a déjà été encensée par la critique et qu’à peu près tout le monde en a dit le plus grand bien puisque ce prodigieux thriller a été créé à la Licorne en janvier 2008. Bon! Parfait pour les critiques et les gens du milieu. C’est maintenant au vrai monde que je m’adresse. À ceux qui vont rarement au théâtre et qui préfèrent les grandes salles et le confort d’une salle comme celui de la salle Maisonneuve où la compagnie Jean-Duceppe s’est installée. À présent est une pièce qui devrait rejoindre tous les publics parce que l’œuvre est difficile à étiqueter. Je parlais d’un thriller tantôt mais en réalité c’est plus que ça, c’est un grand voyage dans l’imaginaire, dans le temps et dans la conscience dans le but de trouver rien qu’une chose : la vérité. Et la vérité, ce n’est pas ce que l’on pense.

Aussi bien vous dire tout de suite que le spectacle est déroutant. Deux couples se croisent dans un building. Catherine-Anne Toupin qui interprète également le rôle principal (Alice) dans cette pièce, forme un couple fragile avec David Savard (Benoît). Tout près d’eux, Monique Miller (Juliette) et François Tassé (Gilles) forment un couple beaucoup plus détendu, plus libre et surtout plus leste. Ce vieux couple partage encore leur appartement avec leur fils de 35 ans (François) interprété par Éric Bernier. Quand tous ces personnages se rencontrent lors d’une soirée chez Alice et Benoît, il y a de l’électricité dans l’air…Je dirais même un peu plus que ça. Disons de la sensualité qui coule rapidement dans un abîme de perversions. Personne n’appartient à personne et tous les goûts sont permis. Attention! On ne parle pas de porno et de scènes croustillantes ici. Non! on saute tout simplement les clôtures et les couples changent de partenaires, changent d’identité dirait-on et le désir semble dominer tous les autres sentiments. Il n’y a plus de règles, il n’y a pas de violence, il n’y a plus de morale qui tienne et on cherche la logique de l’histoire et des personnages. Il n’y en a plus.

Les comédiens sont merveilleux alors qu’ils jouent constamment sur une corde raide. Ils se tiennent debout en évoluant sur le fantasme que l’on soupçonne et la réalité…que l’on soupçonne également. On ne sait plus sur quel tableau cette pièce se joue et c’est sur le bout de son siège qu’on assiste à ce dénouement imprévisible et tout aussi déroutant.

C’est à voir non seulement pour la qualité du spectacle mais pour apprendre à vous connaître et surtout à connaître la ou les personnes qui vous accompagnent.
RÉSERVATIONS : 514-842-2112 OU 1 800 842 2112.
Note : Si vous avez moins de 40 ans, vous payez le prix qui correspond à votre âge (minimum de 20 ans)

mercredi 25 août 2010

Le premier choix de l'été: Belles-Soeurs


Il faut les voir, les entendre pour le croire.

Je voudrais clore cette tournée des théâtres en été avec ce que j’ai vu de mieux. Plus précisément, mon meilleur des meilleurs en été, mon best of : le théâtre musical Belles-Sœurs d’après Les Belles-Sœurs de Michel Tremblay, livret, paroles et mise en scène de René Richard Cyr avec la fascinante musique de Daniel Bélanger.

On regarde ce spectacle présenté à la salle Rolland-Brunelle à Joliette, avec stupéfaction pendant un bon moment avant de prendre du recul et tenter d’en faire la critique. Peine perdue, j’abandonne. Pas question de gâter mon plaisir et de m’efforcer de réduire l’œuvre et de la décortiquer bêtement parce que l’ensemble est éblouissant. Et pourtant j’ai un tas de versions des Belles-Sœurs dont l’une présentée à Stratford, en anglais s’il vous plaît et une digne Ontarienne pleurait tout près de moi pendant le fameux monologue de cette pauvre belle-sœur qui découvrait le plaisir des cabarets à 50 ans. Cette pièce qui a été snobée par bon nombre d’intellectuels à sa création au Rideau Vert dans les années 60, a fait le tour du monde par la suite. On a fini par comprendre que chaque peuple parle joual sur la planète et que Les Belles-Sœurs touchait l’âme et la misère du peuple et de tous les peuples.

Il faut croire que ce chef-d’œuvre de Michel Tremblay ne quittera pas la scène de sitôt puisque le théâtre musical qu’en a fait le comédien et metteur en scène René Richard Cyr, relance ces fameuses belles-sœurs sur la voie de la musique. Et personne n’aurait parié que ce nouveau ménage soit parfait. Le musicien Daniel Bélanger a compris, senti les personnages de la pièce comme s’il était comédien. Il s’est glissé dans tous les personnages et en a tiré de la musique.

Et que dire des comédiennes qui interprètent les compositions de Bélanger? Je n’ai jamais entendu un comédien ou une comédienne mal chanter au Québec. Dans ce cas-ci, on entend les voix exceptionnelles de Maude Guérin, Monique Richard, Sylvie Ferlatte et la surprenante Guylaine Tremblay qui maîtrise la chanson comme si elle faisait son métier en ajoutant Marie-Thérèse Fortin, Christiane Proulx et toutes les autres finalement.

Difficile à décrire le décor alors que l’action se déroule dans une cuisine qui se transforme continuellement. On assiste à des effets visuels à couper le souffle. Et puis, il n’y a jamais de longueurs, jamais de banalités, jamais de cabotinages dans cet étonnant spectacle. Tout est réglé au quart de tour par René Richard Cyr qui a créé une oeuvre mémorable. On retrouve Les Belles-Sœurs que l’on connaît avec l’histoire du million de coupons qu’elles collent dans la cuisine de Germaine Lauzon avec rage et jalousie mais Belles-Sœurs est un spectacle avec une autre énergie, une autre sensibilité et la magie de la musique qui lui donne une autre vie.

C’est évidemment mon premier choix de l’été. Piaf, à cause de la magistrale performance de Sylvie Drapeau, suit de près en deuxième position. En troisième position, j’en surprendrai quelques uns avec le choix de Mars et Vénus. Une mention honorable à Visite libre et à Michel Charrette qui entreprendra une tournée avec cette pièce dans tout le Québec jusqu’en mars prochain. Belles-Sœurs fera aussi une longue tournée qui n’en finira pas, vous verrez bien.

Merci à tous ceux qui ont eu l’élégance et la politesse de m’inviter cet été. Vous m’avez prouvé qu’il y a autant de talents que de générosité dans les théâtres des régions du Québec. Merci d’avoir pris l’habitude de me lire. Ce que je considère comme un honneur. Pour moi, l’expérience a été enrichissante, je dirais même nécessaire et je vais la poursuivre, toujours en quête de théâtre. Une passion dont on ne peut se défaire. Et c’est la grâce que je vous souhaite.

jeudi 19 août 2010

Du théâtre essouflé à l'Assomption



UNE SACRÉE FAMILLE… ENNUYANTE

Dommage que ça ne lève pas au Théâtre Hector-Charland. Dommage pour les comédiens qui ont si peu de matière à jouer, à défendre. Sacré famille, une comédie du Canadien Carl Ritchie a vieilli bien vite et ne suscite auprès du public québécois bien peu d’intérêt si j’en juge par la réaction des gens que j’ai vus dans la salle. Un homme aux idées obtus pour ne pas dire un étroit d’esprit qui est répudié par sa femme parce qu’il l’a trompée et qui par la suite, n’accepte pas l’homosexualité de son fils, me semble au départ assez confondant.On est de droite ou on ne l’est pas. On est vertueux ou on ne l’est pas. J’aurais toujours pu apprécier les échanges sur le sujet dans le cadres des dialogues de la pièce mais ils étaient tellement creux, fades, insignifiants et tissés de clichés qu’il y avait lieu de dormir. Ce que je fus tenté de faire à plusieurs reprises.

Tout allait de travers dans cette pièce en commençant par la distribution des comédiens. Jici Lauzon n’a pas la carrure ni l’autorité sur scène pour interpréter le père réactionnaire. C’est un rôle qui demande du coffre, du poids, de l’expérience. Lauzon n’est pas un mauvais comédien mais il n’a pas encore l’étoffe pour traîner tout un spectacle sur son dos. Nathalie Gascon, au contraire, a trop d’étoffe pour se contenter du rôle assez passif de la mère. Beau gaspillage. Luc Chapedelaine prend tranquillement du gallon et joue sympathiquement, sans plus. Stéphanie Crête-Blais, Benoît Langlais et Jean-François Beaupré jouent avec enthousiasme avec un talent prometteur mais personne n’a participé à un spectacle qui fera époque.

C’est dommage aussi pour l’Assomption et ce merveilleux Théâtre Hector-Charland, l’une de mes destinations préférées en été. C’est un théâtre qui a fortement encouragé l’artisanat local durant les dernières années et Dieu sait qu’il y a de la création à l’Assomption. Les restos, les boutiques, les cafés, les spectacles musicaux sont extrêmement attirants dans cette ville qui abrite le prestigieux Collège de l’Assomption. C’est justement là qu’on présente à chaque année, Les Rendez-vous amoureux, des spectacles-lectures des plus grandes oeuvres du théâtre de répertoire avec des comédiens du calibre de Béatrice Picard, Sophie Faucher, Pierre Chagnon et Yves Corbeil pour ne nommer que ceux-là. J’y est passé de magnifiques soirées au clair de lune, au préau du Collège de l’Assomption. Je sais bien que les dernières lectures ont eu lieu en juillet dernier mais pensez-y pour l’année prochaine et prévoyez y retourner à quelques reprises. Parce qu’il y a toute une ville, toute une région à découvrir. On y fabrique même du vin, de l’excellent vin près de l’Île Ronde, si je me souviens bien. En somme, un site qui mériterait bien du théâtre d’envergure. C’est ce que je nous souhaite pour l’an prochain et qu’on nous ramène Nathalie Gascon qui n’est jamais aussi épanouie qu’à l’Assomption.

jeudi 12 août 2010

Les succès de Philippe Riopelle

Drôle de mariage à Sainte-Adèle

Il fut un temps où il y avait du théâtre tous les étés au Chanteclerc à Sainte-Adèle. C’était même l’un des premiers théâtres d’été fondé par Jacques Normand dans les années 50. C’est le comédien et metteur en scène Louis Lalande qui a été le dernier à diriger ce théâtre avec beaucoup de succès d’ailleurs. Il fut un temps où les artistes, artisans, politiciens et même de riches Américains venaient faire la fête à Sainte-Adèle. C’était un lieu de rendez-vous où l’on retrouvait de grandes personnalités dans les bars, restaurants, pentes de ski ou ateliers des peinture, céramique et boîtes à chansons. Les temps ont changé et Sainte-Adèle est une ville toute aussi charmante mais plus tranquille qu’avant. Certains voyageurs ont préféré le Mont-Tremblant, Saint-Sauveur et plusieurs producteurs et entrepreneurs ont suivi. D’autres sont demeurés sur place. C’est le cas de Philippe Riopelle, un homme d’affaires qui s’est imposé à l’époque des belles années de l’Expo 67 et de Terre des Hommes alors qu’il gérait une douzaine de restaurants et qui s’est intéressé par la suite aux théâtres d’été. On connaît le Théâtre Sainte-Adèle et le Théâtre Saint-Sauveur mais on connaît moins l’homme qui est propriétaire de ces deux théâtres et qui, année après année, fait souvent salle comble dans ces deux théâtres : Philippe Riopelle complètement converti au théâtre. L’homme a toujours travaillé dans l’ombre et n’a jamais reçu la reconnaissance qu’il méritait.

Cette année, il présente deux pièces qui sont adorées du grand public : Les fantasmes de mon mari au Théâtre Saint-Sauveur avec Louison Danis, Roger Léger, Claude Prégent, Vincent Bilodeau et Sylvie Boucher et Vive la mariée avec l’adorable France Castel, le versatile Normand Lévesque et les jeunes Guillaume Champoux, Virginie Morin et Caroline Bouchard. C’est à Sainte-Adèle que j’affectionne particulièrement, que je me suis rendu pour assister à une représentation de Vive la mariée. La pièce est drôle, les comédiens chantent fort bien et particulièrement France Castel, on s’en doute bien (j’aimerais aussi entendre Lévesque chanter plus souvent. C’est un remarquable ténor). Revenons au théâtre pour vous faire part d’un vaudeville qui a fortement amusé la salle pleine à craquer et qui se situe dans la tradition du Théâtre Sainte-Adèle. Ce théâtre présente habituellement des comédies qui tournent autour de la famille et d’excellents numéros d’acteur. Je pense entre autres à Michel Forget surtout, à Pierre Collin, Guy Jodoin, Nicole Leblanc, Ghyslain Tremblay et bien d’autres qui ont déjà joué dans cette ancienne chapelle.

Je n’ai pas vu Les fantasmes de mon mari à Saint-Sauveur. On affichait complet et pas de place, même pour les journalistes ce soir-là. Pas grave, je préférais Sainte-Adèle. Je pense avoir vu une quinzaine de comédies à Saint-Sauveur et je pourrais jurer que c’est un spectacle de qualité avec de nombreux rebondissements, de somptueux décors et toujours une bonne distribution. La salle est plus grande qu’à Sainte-Adèle. La scène également et le public est fidèle.

Cette fidélité, on la doit à Philippe Riopelle qui pense d’abord au grand public. C’est ce qui explique son succès. Cette homme-là a vécu dans le monde de la restauration pendant longtemps avant de se lancer dans l’aventure du théâtre. Ce n’est pas un intellectuel formé dans les grandes écoles de théâtre de Paris. Non! C’est un homme de terrain, un entrepreneur, qui prépare des repas simples, soignés, peu coûteux, rapidement servis avant la représentation théâtrale et qui propose par la suite un style de théâtre que les gens aiment. Et dans cette industrie du théâtre privé, c’est fort défendable. Il a payé Claude Michaud très cher pour jouer dans son théâtre et l’entreprise fut rentable pendant plusieurs années parce que Michaud remplissait les salles.On pourrait croire que Philippe Riopelle s’est toujours assis sur son succès et n’a pas vraiment innové à Sainte-Adèle. Détrompez-vous! Ce colosse de 69 ans et toujours en santé, a déjà voulu construire une tour à Sainte-Adèle, à l’intérieur de laquelle devait se loger une salle de théâtre et de musique de 2 000 places, en plus d’un restaurant et d’un hôtel. Il avait également songé à installer un sentier pédestre autour de l’édifice. Il avait déjà acheté le terrain et avait sollicité l’aide des différents paliers de gouvernement pour mettre en marche son projet qui devait nécessiter un investissement d’une dizaine de millions, si je me souviens bien. J’avais annoncé ce fabuleux projet dans La Presse, à l’époque. L’histoire est longue à raconter mais je retiens que certains citoyens n’ont pas soutenu ce projet et ont mené une cabale contre la Tour de Sainte-Adèle, qui aurait relancé la ville. Moi qui suis amoureux de cette ville, je ne comprends pas encore et j’en éprouve une grande tristesse

vendredi 6 août 2010

Du théâtre réinventé en été, ça existe aussi

UN BIJOU CACHÉ À BLAINVILLE

Fidèle à ses habitudes, le Petit Théâtre du Nord présente au Centre Communautaire de Blainville, une création, du théâtre réinventé, du comédie intelligente avec des comédiens qui font partie de cette remarquable aventure théâtrale depuis la fondation de ce théâtre en 1998. Le Petit Théâtre du Nord, c’est le théâtre que devraient visiter tous ceux qui ont une forte propension à mépriser globalement tout ce qui joue au théâtre en été. Tous ces pontifes de la culture bien assis sur leurs subventions qui se sont bousculés pour aller rire du burlesque, de la misère des comédiens et du théâtre d’été dans son ensemble en allant voir Les Cabotins, au cinéma. Je ne boude pas cet excellent film qui, détail souvent oublié, nous ramène à une autre époque. Peu importe, l’image de kétainerie colle comme un tache de graisse à l’esprit trop obtus de certains festivaliers de fin de semaine.

Tout ça pour vous dire qu’on se démène depuis un dizaine d’années au Petit Théâtre du Nord pour présenter du théâtre de qualité, en innovant, en déroutant et en osant défier des styles, des classiques, des traditions et même certains monuments du théâtre et du cinéma. Cette année, on tourne autour de La Mélodie du Bonheur qui obtient un succès fou à Montréal, dans le cadre du Festival Juste pour rire. C’est pourquoi on a titré cette inquiétante comédie, Mélodie Dépanneur de Mathieu Gosselin. Non, il n’y a pas d’enfants, ni d’Allemands nazis, ni un couvent de bonnes sœurs mais il y a beaucoup de chansons interprétées par les quatre comédiens. De jolies chansons d’ailleurs toutes inédites. Mais c’est le propos qui est délicieusement déroutant.

Une jeune homme reçoit un dépanneur familial en héritage et n’a aucunement l’intention de l’exploiter. Il songe à fermer boutique ou à le vendre. Mais deux jumelles qui ne se ressemblent pas mais qui parlent toujours en même temps, Poupée et Princesse et Kangourou, l’homme qui vient chercher sa bière tous les matins avant de prendre son déjeuner ne l’entendent pas ainsi. Ils veulent conserver cet endroit mythique. On s’enfonce dans un monde trouble lorsque les personnages chantent sans en prendre conscience. Lorsque les chants s’élèvent, la porte s’ouvre et c’est comme si on vivait dans un autre monde. Celui du sous-sol où la culture orientale émane. Une étrange histoire de l’ancien propriétaire du dépanneur et père de Paul, le jeune homme qui veut tout vendre pour se libérer de vieux souvenirs. Il lui faudra une séance d’hypnotisme pour revivre le drame de son enfance. Drame que je ne vous raconterai pas, entre gens de théâtres, cela va de soi.

En somme, une proposition originale, parfois légère, un soupçon de parodie mais toujours intéressante et tout à fait charmante. Excellent jeu des comédiens Luc Bourgeois, Sébastien Gauthier, Louise Cardinal, Mélanie Saint-Laurent, une mise en scène brillante de Benoît Vermeulen qui était tout-à-fait indiqué pour ce voyage dans l’imaginaire de l’enfance et une mention spéciale pour la scénographie de Nathalie Trépanier qui a réussi un véritable exploit. Imaginez qu’elle a réussi à créer une ambiance orientale en construisant des animaux à partir de produits qu’on trouver dans un dépanneur. Par exemple : les griffes du lion sont fabriqués à partir d’un flacon de savon à vaisselle. Les feuillages d’un oiseau avec des sacs de croustilles si je me souviens bien. Un décor prodigieux, je vous jure.

Du théâtre différent tout comme Piaf peut l’être à Rougemont, Les Belles-Sœurs à Joliette, Mars et Vénus à Laval et quelques boulevards qu’on aime bien voir en été. Et tout ça présenté dans de grandes salles spacieuses et modernes. Rappelons à notre élite culturelle, qu’il est loin le temps des granges et des défilés d’autobus.

lundi 2 août 2010

Le plus beau site des théâtres en été


DANIELLE PROULX NOUS ÉTONNERA TOUJOURS

On imagine souvent Danielle Proulx interprétant des rôles de mère de famille, essuyant la vaisselle dans la cuisine, avec un pâté chinois au four et des enfants qui tournent autour d’elle. Si cette image est restée c’est surtout parce qu’elle a donné tellement de vérité à son personnage de mère dans cette drôle de famille dans le film C.R.A.Z.Y. Elle a aussi joué les mères, les tantes dans des séries télévisées. Ma surprise a été d’assister à l’une de ses grandes prestations au théâtre, il y a quelques années, dans Faits pour s’aimer chez Duceppe. Belle, sexy, aguichante, elle dansait, chantait, pétillait sur scène en donnant la réplique à Henri Chassé. J’avais peine à la reconnaître tellement elle avait changé d’emploi, de style et de comportement sur scène. Il n’y avait plus de mère de famille, de personnage coincé, tendu mais une fantaisiste, une romantique et une amoureuse allumée. Bon! Au Théâtre des Cascades, j’ai encore peine à reconnaître l’interprète principale de La Cousine Germaine, une comédie de Carl Ritchie présentée au Théâtre des Cascades.

Danielle Proulx y interprète une Américaine millionnaire qui vient visiter sa famille au Québec. Maquillée à outrance, portant des lunettes de couleurs variables avec une coiffure gonflée qui lui donne des allures de hippie retardée, la comédienne crée encore une fois un personnage qui ne ressemble à rien d’autre de son répertoire. Avec un lourd accent anglais et un sans-gêne tout à fait américain, elle s’impose dans la famille et réussit même à transformer la jeune adolescente (Corrine Chevarier), un peu trop sage pour son âge. Elle provoque même une passion chez un homme d’un certain âge, interprété brillamment par Reynald Robinson.

En somme, un bon spectacle divertissant mais nous sommes au Théâtre des Cascades à Pointe-des-Cascades, près de Dorion, sur la rive du Lac Saint-Louis. Il n’y a pas de plus beau site de théâtre en été au Québec. Et c’est à 35 minutes de Montréal. Je me souviens que ma consœur de La Presse m’avait dit un jour : « Écoute mon Jean! Je suis allée au Théâtre des Cascades, hier soir et je suis tombée en amour avec la place. Trouve-moi des billets pour n’importe quelle pièce à l’avenir, je veux y retourner». C’est pas étonnant. Quand il fait beau, vous mangez à l’extérieur près de la marina avant de marcher quelques minutes jusqu’à la petite chapelle où on présente la pièce et si vous avez le temps, vous vous rendez à la boutique pour vous procurer des œuvres d’artisans locaux. De plus, il y a un immense camping derrière la chapelle, de grands champs et on se croirait à l’autre bout de la province. Et pourtant c’est juste un peu plus loin que le West Island...

Le comédien bien connu Michel Laperrière et sa compagne, tout aussi réputée, Chantal Lamarre ainsi que les hommes d’affaires Jacques et Yves Schmidt sont propriétaires de ce théâtre. Certaines conversations avec des gens oeuvrant autour et dans ce théâtre me laissent croire qu’il y aura des changements dans un avenir prochain au Théâtre des Cascades. On parle d’un changement d’orientation et même de direction. Impossible de connaître les véritables intentions de la part des propriétaires mais en autant qu’on conserve le site tel qu’il est et qu’on améliore la formule, personne ne s’en plaindra.

lundi 26 juillet 2010

Une déception à Trois-Rivières



J’étais triste au Théâtre des Marguerites, à Trois-Rivières. Non seulement parce que la route était longue sous la pluie et même l’orage mais surtout parce que la pièce qu’on y présentait, 10-4 de Paul Slade Smith, m’a ennuyé profondément. Jamais je n’ai cru aux personnages et à cette histoire de deux policiers qui enquêtent sur une fraude de $16 millions qu’aurait orchestré le maire de leur municipalité. C’est aussi gros et aussi peu nuancé que les histoires du pirate Maboule dans le temps à la télévision de Radio-Canada.

Dommage parce que le théâtre des Marguerites mérite mieux. Dommage parce que la famille Bergeron mérite mieux. Pour ceux qui ne serait pas au courant, c’est Reynald Bergeron qui a vendu ce théâtre, il y a quelques années à ses fils Mathieu et Vincent ainsi qu’à Stéphane Bellavance. Ces trois jeunes hommes ont accompli un travail colossal dans ce qui a déjà été l’un des théâtres les plus populaires dans tout le Québec. Il ne faut pas oublier que le Théâtre des Marguerites a été fondé et dirigé par Georges Carrère et Mariette Duval et qu’on y a présenté du grand théâtre depuis 1967. Carrère ne s’est résigné à vendre son théâtre uniquement que pour des raisons de santé. Reynald Bergeron a acheté le théâtre et a vendu, à des conditions très favorables j’imagine, un théâtre qui a une longue histoire derrière lui.

Les fils Bergeron m’ont enchanté durant les dernières années par leur travail. Autant au niveau de la création sur scène que de la rénovation du théâtre. Soulignons aussi la contribution de la famille Bellavance qui a investi temps et argent dans le rafraîchissement de cette vieille grange qui commençait à plier sous le poids de l’âge. Les jeunes producteurs ont mis par la suite autant d’énergie à rajeunir, à rafraîchir le théâtre en été. Et c’est justement ce que le théâtre avait grandement besoin en été. Avec Adieu beauté, Entre-deux, C ‘est devenu gros, Notre amour est trop lourd, ils ont rallié un jeune public qui avait déserté le théâtre en été, depuis un bon moment déjà.

Je pensais à toutes ces belles années, en regardant 10-4, une comédie policière qui ose nous faire croire qu’il existe une mafia acadienne qui terrorise les villes du Québec. Ouf! Moi j’aime bien Robert Brouillette qui se démène dans cette farce insipide tout comme Isabelle Cyr d’ailleurs. Oublions tout le reste dont le décor, l’histoire et la mise en scène de Olivier Aubin. Celui-ci a pourtant signé un excellent spectacle à Sorel avec Sous-sol à louer.

Je ne connais pas toutes les intentions et surtout pas la situation financière des jeunes propriétaires du Théâtre des Marguerites mais il me semble évident qu’ils ont tenté de rejoindre un plus grand public avec 10-4 qui ne pèche pas par excès de subtilité. C’est une erreur à mon avis parce qu’ils risquent de perdre ainsi la fidélité des spectateurs et la marque, pour ne pas dire la griffe de l’entreprise. Je sais bien qu’on peut parler d’un accident de parcours, d’une mauvaise année après plusieurs belles réussites. Et voilà le drame qui secoue et ruine plusieurs théâtres en été. Il n’y a pratiquement pas de marge de manœuvre au théâtre en été. On ne peut se permettre de perdre des revenus pendant une trop longue période. Une mauvaise saison amène de graves problèmes financiers, une deuxième est habituellement catastrophique. Non seulement les gens de théâtre se plaignent quand les choses vont moins bien mais les commerces autour en subissent les conséquences. Quand tout va, tout le monde s’engraisse. Quand tout va mal, on ne s’engraisse pas mais c’est le théâtre qui paye. Que font les conseils de ville, les commanditaires? Rien d’autre que de constater les dégâts ou de laisser mourir un théâtre. Quand la ville de Trois-Rivières décidera-t-elle d’appuyer, de participer financièrement, à la rénovation d’un des plus vieux théâtres en été du Québec? Est-ce trop demander? Regardez donc ce qu’on a réalisé à l’Assomption et à Terrebonne. Les théâtres Hector-Charland et celui du Vieux Terrebonne, messieurs les fonctionnaires.

lundi 19 juillet 2010

DU RIRE EN WANABAGO


POUR LE SITE ET POUR LA PIÈCE À CHÂTEAUGUAY

Ce qui distingue le théâtre en saison régulière et le théâtre en été, c’est d’abord l’environnement. Les gens qui se déplacent pour assister à une représentation théâtrale durant la belle saison, aiment bien profiter de la nature, des restaurants, des boutiques, parfois des gîtes autant que de la pièce. Le théâtre en été, c’est la découverte d’une région du Québec et de ses ressources, de sa gastronomie, des activités locales parfois surprenantes. Je connais des mordus de théâtre en été qui vivent une journée ou deux autour de chacun des théâtres qu’ils visitent.

Au Québec, les deux plus beaux sites de théâtre en été, à mon avis, et je tiens à préciser que je les ai presque tous visités pendant les 27 dernières années, sont situés à Pointe-des-Cascades et à Châteauguay. Ce sont deux endroits qu’il faut visiter pour l’étendue et surtout la beauté des sites. Je reviendrai sur les attraits du Théâtre des Cascades, un peu plus tard durant la saison. Pour le moment, j’aimerais vous inciter à découvrir le site du Manoir d’Youville où l’on présente au Pavillon de l’île, à l’Île Saint-Bernard de Châteauguay, Wanabago Blues de la québécoise Isabelle Hubert.

Avant de commenter cette pièce qui a été créée en 2004 au Théâtre d’été de la ville de Mont-Tremblant, je dois vous avouer que je suis littéralement tombé en amour avec cette île, véritable havre de paix et de recueillement avec son manoir et différents pavillons construit pour les Sœurs Grises à une autre époque. Il y a de tout sur cette île d’une centaine d’arpents: un sentier pédestre de 10 km, une piscine extérieure, 250 pommiers, des maisons historiques, le théâtre d’été et le Manoir d’Youville qui vous propose 105 chambres pour retrouver le calme et la paix sur un majestueux paysage, face au Lac Saint-Louis, à compter de $62. Une aubaine et le secret le mieux gardé en ville. Et tout ça à 35 minutes du centre-ville de Montréal.

Le Pavillon de l’Île était plein à craquer lors du soir de la première de Wanago Blues et la critique et les spectateurs ont semblé apprécier cette pièce qui a déjà fait ses preuves puisqu’elle a été présentée dans plusieurs villes de la province depuis sa création en 2004. Stéphane E. Roy a fait du bon travail à la mise en scène et il disposait d’excellents comédiens. Rien de moins que Claude Laroche, Chantal Baril, Patrice Coquereau, France Pilotte et Catherine-Anne Toupin.

La pièce semble légère, frivole alors qu’on s’amuse à voir deux couples amis qui se lancent un défi : arriver le premier à Vancouver à bord d’un wanabago. Et quel est l’enjeu de cette course? Le gagnant se verra épargner de la garde du grand-père malcommode et dérangeant. Ils rencontreront plusieurs personnages durant leur voyage et les deux couples devront tolérer, s’adapter et évoluer après avoir quitté la maison de banlieue. L’auteur en profite pour passer quelques messages sur l’environnement, les valeurs de la nouvelle génération et évidemment sur les relations de couples. Un autre texte québécois qui aura la vie longue. En plus de l’excellence du jeu des comédiens, j’ai apprécié aussi l’apport de scènes vidéos dans la pièce et l’utilisation du motorisé. En somme, une comédie fraîche et légère en wanabago, en été, sur une île enchantée. Que demander de mieux en période de canicule?
Une dernière confidence avant de se quitter : un confrère n’a pu résister aux charmes de l’endroit et a décidé de s’offrir une chambre pour la nuit et de visiter l’île, le lendemain de la première. En compagnie de son épouse, cet homme de 80 ans a vécu une journée de rêve. Un jour, je vous dévoilerai son nom.
( Photos - Caroline Laberge )

mardi 13 juillet 2010

QUAND C'EST LE PUBLIQUE QUI DÉCIDE


MARS ET VÉNUS : DU RIRE QUÉBÉCOIS

Quelle bonne idée de reprendre et de rafraîchir la comédie Mars et Vénus, présentée cet été au Théâtre Marcellin-Champagnat et écrite par l’humoriste Sylvain Larocque et Stéphane E. Roy. Cette pièce créée en 2005 à Joliette et a obtenu assez de succès auprès du grand public et de la critique pour être jouée plus de 140 fois depuis. Ce qui prouve qu’il y a des auteurs chez nous qui peuvent donner un second souffle au théâtre en été. Qu’on se réveille et qu’on fasse appel à eux. Et que ceux-ci fassent leur part également et qu’ils écrivent pour les nombreux théâtres qui survivent et qui tiennent le coup en été.

J’ai entendu dire l’un des auteurs, Sylvain Larocque qui était assis tout près de moi dans la magnifique salle du Théâtre Marcellin-Champagnat à Laval: « Quand j’entends les gens réagir et rire aussi souvent pendant la pièce, ça me donne le goût d’en écrire une autre! » J’espère bien que ça se fera et en compagnie de Stéphane E. Roy qui a déjà écrit un petit bijou intitulé Me, myself et moi-même Les pièces québécoises sont, à mon avis, préférables à bien des traductions américaines ou anglaises. Je n’ai rien contre le théâtre de l’étranger. Surtout pas. Mais il faut prendre sa place et la saveur québécoise dans l’humour n’est pas négligeable. Les Chantal Cadieux, Michel Marc Bouchard, Jacques Diamant pour ne nommer que ceux-là, ont produit des œuvres marquantes pour les théâtres en été. Et il faut préparer une relève. Vous cherchez une relève? Regardez du côté de Granby au Théâtre de l'Ancien Presbytère plus précisément. Vous m’en donnerez des nouvelles

Revenons donc à la nouvelle mouture de Mars et Vénus au Théâtre Marcellin-Champagnat. Disons tout de go qu’il s’agit d’un excellent spectacle et que les rires fusent dans la salle pendant toute la soirée. Un de mes amis, invité pour cette soirée, s’est même étouffé à plusieurs reprises à la suite de certaines envolées oratoires de Pierre-François Legendre qui interprète le rôle de Félix dans la pièce. Il donne la réplique à Catherine Lachance qui campe le personnage de Mélanie. Philippe Provencher joue le rôle du narrateur. Non seulement il présente les personnages mais il intervient dans la pièce pour demander au public de déterminer le destin de la vie du couple formé par Félix et Mélanie. Par exemple : qui fera les premiers pas dans la relation de couple? Qui fera la demande en mariage? Quel objet sera le sujet d’une dispute? Est-ce qu’ils vont se séparer? C’est le public qui vote avec des cartons bleus ou rouges.
Imaginez la souplesse que cet exercice exige de la part des comédiens. Mathématiquement ils ne peuvent jouer deux fois la même pièce ou très rarement.

C’est l’histoire banale d’un couple. Une histoire que tous les amoureux connaissent avec les clichés, les préjugés que l’on peut imaginer mais c’est tordant du début à la fin avec un petit pincement au cœur à la fin. Personnellement j’ai adoré. Après cinq ans, cette pièce a bien vieilli et fera encore rire pendant des années mais ses auteurs devraient se remettre au bureau et inventer encore une fois la formule du théâtre en été. Après le théâtre interactif, ça pourrait être du théâtre-cinéma, du théâtre improvisé, un mélo, du théâtre policier drôle…Faîtes vos jeux!
(Crédit photo: Mario LeBlanc)

mardi 6 juillet 2010

C'EST LA FÊTE AU THÉÂTRE DU CHENAL-DU-MOINE


On ne pouvait choisir une meilleure comédie, une meilleure distribution et un meilleur metteur en scène pour souligner les trente ans du Théâtre du Chenal-du-Moine. Sous-sol à louer a déjà été présentée, il y a une dizaine d’années, dans ce même théâtre où l’on retrouve, cette année, dans cette riche distribution, les Bernard Fortin, Jean-Pierre Chartrand, Geneviève Rioux, Marie-Josée Bastien, Milène Leclerc, Gabriel Sabourin, Marie-Joanne Boucher et Louis-Olivier Mauffette. On respecte la tradition chez les Bergeron, propriétaires du théâtre depuis trente ans, en favorisant les grandes distributions et en démontrant une rare fidélité avec les comédiens. Bernard Fortin par exemple est associé au Théâtre du Chenal-du-Moine depuis huit ans. La plupart des autres comédiens ont déjà joué à Sainte-Anne de Sorel. Robert Lavoie, comédien et auteur qui a travaillé à plusieurs reprises dans ce théâtre, reprend du service en adaptant cette pièce de Mariott et Grant après une longue maladie qui lui a coûté un rein. On ne l’engage pas beaucoup ailleurs mais on n’a pas hésité à lui faire confiance au Théâtre du Chenal-du-Moine. Le respect et la loyauté envers les comédiens m’a toujours impressionné dans ce théâtre de Sorel. Je me souviens de Claude Prégent, Annette Garant entre autres qui ont joué de nombreuses années au Chenal-du-Moine. Il y a toujours quelque chose à manger et à boire pour les comédiens et visiteurs de marque après les spectacles. Et c’est habituellement joyeux et convivial. Ce théâtre aime manifestement ses comédiens.

Et cette année, on a fêté joyeusement et dans la tradition, ce trentième anniversaire avec les comédiens, la famille Bergeron et toute l’équipe. En 2007, Reynald Bergeron a cédé son théâtre à ses fils Mathieu et Vincent ainsi qu’à Stéphane Bellavance mais il y a une continuité dans cette entreprise. Le père, aujourd’hui retraité, est toujours là et ses fils ont eu la sagesse de respecter la tradition et de proposer aux habitués du théâtre, des comédies qui s’inscrivent dans le style qui a fait la réputation de la maison. Mieux encore, en confiant au jeune Olivier Aubin, la mise en scène de Sous-sol à louer, ils ont rafraîchi la pièce et lui ont donné une nouvelle énergie. Soyons francs, la nouvelle mouture de cette comédie est de beaucoup meilleure que la version de 1992.

Je sais, je sais, on claque beaucoup de portes pendant cette comédie et on entre et on sort très souvent de l’appartement. Et puis après? Nous ne sommes pas au cinéma avec des prises de vue en hélicoptère et des contre-plongées et des travellings sur rails. Au théâtre, on ouvre et on ferme des portes depuis la nuit des temps. Et les gens adorent ça, surtout quand on les surprend et qu’on ferme les portes au bon moment.

Chapeau à ce propos à Bernard Fortin qui offre une performance athlétique de plus de deux heures sur scène. Le personnage de Simon qu’il interprète, chômeur et sans le sou, décide de louer le sous-sol de la maison qu’il occupe à une jolie dame les fins de semaine puisqu’elle travaille à Toronto durant la semaine. Il loue le même logement la semaine à un jeune homme qui travaille à Sherbrooke la fin de semaine. Un député complique l’histoire en louant le sous-sol à quelques occasions pour recevoir ses petites amies. On imagine les complications, les quiproquos.

C’est surtout Bernard Fortin qui donne le rythme à cette pièce en se démenant et en donnant beaucoup de place aux autres comédiens. Fortin est à mon avis le meilleur faire-valoir actuellement au Québec. C’est un acteur et un metteur en scène également, d’une rare générosité. Et je pense qu’il communique beaucoup d’enthousiasme à l’équipe. Cette année, il a laissé la mise en scène à Olivier Aubin qui a beaucoup soigné son travail. Il a réglé le timing de la pièce comme dirait Denise Filiatrault, au quart de tour. Allez voir Sous-sol à louer pour vous amuser, pour fêter et aussi pour la région qu’il faut visiter. Je pense à la magie des Îles des Sorel, aux restaurants dont celui du Survenant, juste à côté du théâtre et à l’accueil des gens de la place.
(Crédit photo: Philippe Manning)

samedi 3 juillet 2010

PIAF TRIOMPHE ENCORE À ROUGEMONT


« Elle a travaillé pendant un an afin de connaître et de se transformer en Édith Piaf » répétait, Jean-Bernard Hébert, directeur artistique et propriétaire du Théâtre de Rougemont, en commentant la performance de Sylvie Drapeau après la première de Piaf. Jean-Bernanrd était ravi, ému, emporté par cette vague d’amour et d’émotions que s’étaient échangés les spectateurs et Sylvie Drapeau durant la représentation. Belle occasion pour lui de fêter le 25e anniversaire de sa compagnie alors qu’il produit cette année, fort probablement la meilleure pièce de l’été. Définitivement, la meilleure performance de la part d’un comédien ou d’une comédienne.

J’étais heureux de ce triomphe parce qu’il me permet de frapper encore une fois sur le clou et de répéter qu’il existe du théâtre de grande qualité, en été et ailleurs qu’à Montréal. Je ne sais pas si un jour, on comprendra l’importance du rayonnement du théâtre en été. C’est vital pour le métier et pour les régions. Parce que non seulement j’ai vu une pièce qui m’a fait vivre de grandes émotions à Rougemont mais j’ai aussi acheté une bouteille de vin au restaurant voisin : le Mont Rouge. Je ne savais pas qu’on faisait du si bon vin à Rougemont. C’est ça aussi le théâtre en été. On découvre le Québec, un peu plus, à chaque fois qu’on se déplace pour assister à un spectacle.

Revenons à Piaf pour louanger, quoi dire d’autre, la phénoménale prestation de Sylvie Drapeau qui du haut de sa grande taille qui doit bien faire près de six pieds, réussit à se ramasser dans le tout petit corps d’Edith Piaf qui faisait à peine cinq pieds. Et on y croit à ce personnage d’Édith Piaf dès le début de la représentation alors qu’on nous présente la toute jeune Piaf devant un micro dans les années 30. Sylvie Drapeau disparaît derrière le maquillage, la robe noire et surtout les gestes, l’énergie et la vie difficile de la môme Piaf.

On reprochera bien des choses à la mise en scène de Jacques Rossi. Je n’irai pas jusque là. La première partie est plus lourde, plus noire, peut-être un peu confuse parfois mais c’est à mon avis, un reflet de l’époque et des quartiers miséreux de Paris pendant la dernière guerre. Et on oublie la qualité de sa scénographie avec les superposition de plusieurs cadres qui permet de voyager dans l’espace et le temps. Cette première partie présente les personnages, situe le contexte et raconte les débuts laborieux de la chanteuse. L’auteure, Pamela Gems, est anglophone et raconte Piaf avec une vision américaine. Et j’ai remarqué, que l’on se plaît à démarrer lentement les représentations chez les anglo-saxons et à éclater en deuxième partie, comme si on voulait ménager les munitions pour le dernier segment du spectacle. Et ça éclate dans ce Piaf imaginée par Pamela Gems. C’est Piaf qui atteint le succès et qui vieillit très vite devant nous. Elle créé sa propre légende avec sa sincérité, ses excès, son opium et ses amants. Et jamais, elle n’abandonnera son public, sauf quand elle s’écroulera, au bout de ses forces, au bout de sa santé devant lui. Et c’est là que Sylvie Drapeau se surpasse et atteint des sommets. Je n’ai aucune inquiétude, on se précipitera pour assister à cette prestation. Pour dire dans plusieurs années, qu’on était là quand Sylvie Drapeau a joué Piaf. Comme moi, je dis aujourd’hui que j’étais là quand Sylvie Drapeau a joué Rosana, dans Le temps d’une vie au Théâtre du Village d’Émilie, à Grand-Mère en 1993.
(Crédit photos : Mathieu Rivard)

mardi 29 juin 2010

UN BRIN DE NOSTALGIE AU THÉÂTRE DES HIRONDELLES


DE LA GRANDE VISITE…LIBRE

En voyant évoluer Michel Charrette dans la comédie Visite libre présentée au Théâtre des Hirondelles à Saint-Mathieu de Beloeil, j’ai souvent pensé à Claude Michaud. Il y a une certaine ressemblance dans la générosité du jeu, dans la complicité avec le public et le sens du comique. J’ai vu tellement souvent Michaud transformer une pièce bien ordinaire en un grand succès auprès du public à cause de son talent de comédien et son sens de l’improvisation. Il a été propriétaire du même théâtre où évolue actuellement Charrette, qui portait alors le nom de La relève à Michaud. Il a fait souvent salle comble de 1978 à 1991 alors qu’il dirigeait le théâtre, jouait, adaptait les textes, en plus de signer la scénographie et la mise en scène. Michaud a tout fait dans ce théâtre, même acheter des accessoires de théâtre chez le quincaillier et je l’ai vu poser des affiches de son théâtre sur les poteaux.

Barette n’a pas besoin d’en faire autant parce d’abord, il n’est pas propriétaire des lieux et il est fort bien entouré par Lyne Drolet et Mario Provencher, les jeunes propriétaires du Théâtre des Hirondelles, du metteur en scène François Chénier et des comédiens de la trempe de Diane Lavallée, Jeff Boudreault, Brigitte Lafleur et Martin Héroux.

Ma grande surprise a été d’apprendre que Michel Charette avait eu l’idée et avait écrit le texte de Visite libre en compagnie de François Chénier. Je ne savais pas que Charrette avait ce talent. Et là, on parle de beaucoup de talent parce que le texte permet à cette comédie d’être gagnante dès le départ. Une idée fort simple mais tellement efficace : un agent d'immeuble dont l’ambition est totalement démesurée qui veut absolument vendre une maison et qui prend tous les moyens pour y arriver. Il reçoit beaucoup de clients et il doit trouver un acheteur en peu de temps. Le problème, c’est que ce vendeur sous pression n’a plus de répit, plus de véritables amis et plus de vie personnelle.

On verra bien comment il finira par résoudre ce problème mais l’intérêt de la pièce réside dans la parades d’acheteurs potentiels qui nous donnent des numéros tordants. Et ce à répétition. Je n’oserais pas comparer cette pièce au phénomène Broue mais il y a certaines ressemblances, au niveau du rythme et de la qualité du jeu des comédiens qui multiplient les personnages. J’ai beaucoup aimé la prestation de Martin Héroux qui nous livre un numéro presqu’acrobatique d’un vieillard complètement perdu qui n’arrive jamais à monter un escalier. De quoi se souvenir d’Olivier Guimond. J’ai aimé aussi Charrette qui se transforme continuellement et qui a un sens de la scène, une présence et cette complicité dont je parlais tantôt qui me permettent de prédire qu’il fera sa marque dans les théâtres d’été. Il sait d’instinct se rapprocher du public et c’est ce que les gens réclament dans l’atmosphère de fête et de détente des théâtres en été.

Rien à redire de la distribution quand on connaît le talent de Diane Lavallée qui ne semble pas vouloir vieillir et de Jeff Boudreault dans le rôle du vendeur. Brigitte Lafleur, c’est à mon avis, l’une des plus belles promesses du théâtre. En somme, un remarquable distribution et une mise en scène réussie de François Chénier. Une petite réserve sur certains aspects gaillards de la pièce. Il n’est pas nécessaire de… « faire dans ses culottes », pour faire rire. Et si ça vous fait rire. Tant mieux! Je parle ici d’un détail parce que cette comédie devrait avoir une longue vie. Si vous voulez rire absolument même gras, vous ne serez pas déçus. Une des meilleures pièces de l’été!
(Crédit photo: Simon Duhamel)

mardi 22 juin 2010

RETOUR AU THEATRE ET RETOUR D’ASCENSEUR jusqu'au 4 septembre 2010


On revient toujours à son premier amour et c’est pourquoi je reviens à ce que j’ai préféré vivre pendant mes 32 années à titre de journaliste et critique au journal La Presse : le théâtre. Le théâtre m’a grandi, nourri, formé et amusé. Je lui dois beaucoup et aujourd’hui je veux lui rendre un peu de ce qu’il m’a donné, en reprenant la plume pour raconter mes coups de cœur, mes déceptions, mes espoirs et surtout mon indéfectible soutien à tous ceux qui oeuvrent dans ce monde fabuleux qu’est celui du théâtre.

Ce sont les gens les plus généreux que je connaisse. Je pense d’abord aux comédiens et je me rappelle aussi de tous ceux qui ont investi sans aucune aide des gouvernements, pour fonder un peu partout en province, des théâtres qu’ils ont maintenus à bout de bras, vivant année après année dans l’incertitude et l’insécurité. Chapeau! Tous ces gens qui oeuvrent dans le monde du théâtre en été méritent au moins une critique bonne ou mauvaise. Ils méritent un peu d’attention, une certaine reconnaissance. En tout cas, ils ne méritent surtout pas qu’on les oublie ou qu’on les ignore dans les journaux. Ils ont déjà accueilli plus d’un million de personnes, durant les étés des années 80. Ils en reçoivent peut-être 600,000 ou 700,000 actuellement mais ce sont des spectateurs…payants qui font rouler l’économie de plusieurs villes du Québec si on pense à l’hébergement et la restauration. Mépriser le théâtre d’été du Québec c’est mépriser l’un de nos plus beaux fleurons. Qu’on se le dise!

Après cette profession de foi et ce retour d’ascenseur, revenons à la critique et au … Retour d’ascenseur, la première pièce que j’ai vue cette année. Il doit sûrement y avoir un destin dans ce bas monde. Sans le savoir, alors que je prends la route pour Terrebonne avec l’intention d’écrire ce premier blogue, je découvre que Retour d’ascenseur est en réalité la même comédie que j’avais vue à Sorel, à la fin des années 80 qui portait alors le titre de L’amuse gueule.Il s’agissait de ma première critique d’une pièce de théâtre en été et Patrice L’Écuyer y interprétait le rôle principal. Tout comme les spectateurs du Théâtre du Chenal-du-Moine, j’avais été emballé par son jeu. Il dominait totalement la distribution par son énergie, ses prouesses physiques et sa projection. J’ai toujours pensé par la suite que L’Écuyer avait volontairement passé à côté d’une grande carrière d’acteur au théâtre. Il a préféré la sécurité et la belle vie sans critique d’animateur de jeux de société à la télé.

Tout ça pour vous dire que Benoît McGinnis n’est pas Patrice L’Écuyer et que sa prestation dans le rôle de Yan, l’artiste peintre n’est pas aussi dominante. On a changé le titre de la pièce parce qu’on a voulu adapter la pièce en québécois. Une initiative qui personnellement me laisse froid. Le dîner de cons n’était pas meilleure en québécois. De toute façon, je préfère toujours la pièce originale. Parce que L’amuse gueule, la pièce originale écrite par Gérard Lauzier est drôle, dynamique et mise sur le jeu physique des acteurs. C’est une pièce folle, délirante qui demande de la démesure et presque des acrobaties. C’est ce qui manque dans cette version mise en scène par Alain Zouvi. Admettons que c’est souvent drôle et que le texte est bien rendu par la plupart des comédiens mais ce n’est pas le délire que j’attendais.

Difficile de raconter l’histoire de cette comédie, tellement elle est visuelle. Disons qu’il s’agit d’un peintre qui reçoit la visite d’une voisine en petite tenue qui ne peut rentrer chez elle parce qu’un courant d’air a fermé la porte de son appartement. Pour lui rendre service, il se rend dans le logement de la jolie voisine en passant par le balcon. Le conjoint de la voisine, un homme musclé et jaloux, arrive au même moment, découvre sa compagne dans un autre appartement, le voisin dans son logement et voilà qu’une femme mariée se présente dans l’appartement du peintre et qu’il s’agit de la femme de ses rêves ou de ses fantasmes. Vous voyez le genre et les nombreuses possibilités de rebondissements.

J’aurais tellement aimé voir Benoît Brière dans le rôle du peintre. Lui qui a été sublime dans Ténor demandé et Oscar à Terrebonne. Il faut dire que depuis la nomination de Brière à la direction artistique du Théâtre du Vieux-Terrebonne, la directrice générale Suzanne Aubin, a mis la barre très haute. Elle a fait de ce magnifique théâtre, l’un des plus prestigieux du Québec et les attentes sont grandes.

À la prochaine!
(Crédit Photo: François Brunelle)